Dans un article intitulé « Etes-vous un nageur de buste ou de bras ?« , nous avons évoqué la manière dont certains nageurs savent utiliser toute la force de leur tronc dans leur crawl pour générer plus de puissance en évitant de forcer sur leurs bras. Pour les reconnaître, c’est assez facile: observez la morphologie des crawleurs les plus rapides dans les bassins et vous constaterez qu’ils n’ont pas forcément les bras très épais et musclés, bien au contraire.
Si on pousse un plus loin l’explication, on constate chez certains nageurs parmi les plus rapides non pas seulement un roulis mais également un réel tangage. On a déjà parlé de manière extensive du roulis en crawl. Depuis 2009 dans nos premiers écrits, nous avons insisté sur l’importance du roulis, sur le fait que le crawleur ne devait pas rester à plat sur l’eau mais que son corps devait effectuer un mouvement de rotation autour d’un axe longitudinal. Le tangage désigne lui le mouvement de rotation du nageur autour d’un axe transversal : il crée une oscillation d’avant en arrière. Le haut du corps du nageur monte et descend. A première vue, cela paraît aller à l’encontre de la recherche d’hydrodynamisme.
Il faut d’abord mieux décrire ce tangage. Sur ces images de Michael Phelps, il est très visible. On voit très bien son épaule s’enfoncer profondément dans l’eau. Sa tête accompagne même ce mouvement. On est très loin du mouvement recommandé par certains académiques, à savoir allonger son bras à l’horizontal en restant proche de la surface de l’eau. On n’est pas non plus dans un simple mouvement de roulis. Si c’était le cas, sa tête resterait près de la surface alors qu’on voit bien qu’elle s’enfonce littéralement sous l’eau dans un geste actif.
La raison de ce mouvement est qu’il permet de générer plus de puissance et de propulsion. C’est selon ce même principe qu’un wing boarder va faire décoller sa planche en pompant sur son foil. En exerçant un mouvement vertical de pression de haut en bas sur un foil, on génère une portance qui contribue à la propulsion vers l’avant. Le nageur lui utilise le haut de son corps un peu comme un foil.
On constate d’ailleurs ce tangage aussi en eau libre; par exemple, Jan Frodeno, champion du monde en triathlon et parmi les meilleurs nageurs dans ce sport. On le voit brièvement faire sur cette vidéo où, au contraire, son suivant, moins rapide, Lionel Sanders, garde les épaules à la surface de l’eau ou quasiment (voir la vidéo à 2’44).
Maîtrisez ce tangage est très difficile. C’est même quasiment impossible si vous ne maîtrisez pas tous les autres éléments d’une bonne technique de crawl (horizontalité, geste, etc.). Je vous renvoie à notre livre pour aller dans le détail de toutes ces principes. On ne conseillera donc pas aux crawleurs débutants ou même moyens de tenter d’essayer d’inclure ce tangage dans leur nage. Mais si vous maîtrisez déjà très bien le crawl et que vous souhaitez nager encore plus vite et passez, par exemple, sous la barre des 1’30 au 100m en endurance, cela peut être une voie de travail et de progression.
Très bon article, merci ! Merci aussi d’avoir bien précisé que ce n’est pas une technique pour les débutants. Le nageur russe Ilya Borodin a un tangage tellement prononcé qu’il fait une ondulation de dauphin après la respiration. Sur la vidéo d’effortless swimming du 31 mai 2021, vous pouvez le voir, c’est impressionnant 😉 https://youtu.be/J5AYaVYPknM
Merci beaucoup ! J’avais pas vu cette vidéo !